Le vrai courage
Cette semaine, CASA diffusait déjà le deuxième épisode de l’Appel de la nature! C’est fou comme le temps passe vite! Que pensez-vous de la série documentaire jusqu’à maintenant? Est-ce que les deux épisodes visionnés vous ont donné envie de repenser votre quotidien? Est-ce qu’ils vous ont fait rêver ou fait réfléchir? Y a-t-il un projet en vous qui ne demande qu’à être mis en branle? Écrivez-nous!
Les conditions gagnantes
Tout au long de la pandémie, le marché immobilier québécois, comme ailleurs, s’est littéralement enflammé! À la suite de sa mise en vente, notre maison s’est vendue en moins de cinq jours. En trois jours seulement, nous avons effectué une quarantaine de visites et reçu sept offres d’achat; non seulement nous avons obtenu un excellent prix, dû à une (inévitable) surenchère, mais en plus, les conditions d’achat proposées étaient extrêmement généreuses. Nous avons ainsi pu bénéficier de plusieurs mois d’occupation aux frais de l’acheteur et repousser la date de prise de possession le plus tard possible. Dans ces circonstances, nul besoin de mentionner que le stress du déménagement s’en est trouvé considérablement diminué. Un coup de chance, comme un clin d’œil du destin.
Travail acharné
Avril 2020. Le printemps était là, stimulant et porteur d’espoir, pourtant bien différent, chez nous et au sein de Société Design. Nos boîtes de courriels étaient pleines, notre téléphone ne dérougissait plus. Les mandats que nous acceptions étaient prometteurs et excitants, mais la charge de travail qui nous attendait frôlait le ridicule!
C’est que depuis le début de la crise sanitaire, les prix des matériaux ont augmenté drastiquement. Il y a pénurie partout, pour tout et rien. Les délais administratifs ralentissent tous les secteurs. Les permis mettent du temps à être obtenus, les délais de soumissions et de livraisons sont plus longs, les retards sont fréquents… Il y a pénurie de main-d’œuvre, sur les chantiers, dans les bureaux, dans les banques… Les professionnels, les corps de métier du bâtiment, tout le monde est débordé.
En avril 2020, donc, il nous fallait revoir ou intervenir dans la plupart de nos projets en cours. Non seulement nous n’arrivions pas à conclure nos mandats, au grand désespoir de nos clients, mais nous ne suffisions pas non plus aux demandes grandissantes en tous genres. Des clients potentiels se disaient prêts à donner des acomptes pour retenir nos services jusqu’à deux ans à l’avance, s’il le fallait, du jamais vu! On peut penser qu’il s’agissait là d’un beau problème, comme on dit, mais en réalité, ça signifiait surtout qu’il faudrait tenir le coup et que le sprint que nous vivions devrait durer le temps d’un marathon!
En parallèle, il y avait naturellement la vie qui continuait, avec les enfants et les complications scolaires, la pandémie qui n’en finissait pas… et le projet de maison.
Nous n’avions toujours pas conclu la conception des plans et nous devions bucher – littéralement, comme dans « couper du bois ».
Le plan final
Nous ignorons combien d’heures ont été nécessaires pour arriver au plan final de la nouvelle maison. Il aurait pu y avoir 50 versions différentes de cette maison: la version 2020, la version 2021, la 2022, et alouette! Nous aurions aimé retravailler, peaufiner, repenser, encore et encore, réduire, surtout, puisque les coûts de construction éventuels grimpaient, mais à un certain point, nous n’arrivions plus à nous restreindre davantage.
La première version du plan de notre nouvelle maison frôlait les 5500 pieds carrés, un volume beaucoup trop grand pour nos besoins réels. THE AMERICAN DREAM! Comme beaucoup de gens quand vient le temps d’imaginer la maison de leurs rêves, nous sommes tombés dans le panneau, par désir, par déni, à grands coups de « tant qu’à y être » … Au fond, nous nous doutions bien qu’il faudrait éventuellement modifier radicalement le concept au moment du financement, mais nous nous prélassions encore dans le confort de l’aveuglement volontaire, en quête d’un mirage totalement irrationnel. Peut-être, au fond, avions-nous besoin de cet élan pur pour continuer d’avancer?
Normalement très inspirés par l’architecture moderne dans notre pratique, nous nous sommes laissés tenter, pour ce projet personnel, par un style nordique minimaliste, plus propice au site et à l’environnement naturel. Loin de la version originale de 5500 pieds carrés, la maison en construction est finalement de 3200 pieds carrés, superficie ni grande ni petite. La maison bâtie sera unique, personnalisée, lumineuse, épurée et très fonctionnelle! Son design sera assumé et aura du caractère. Notre maison sera durable et faite de matériaux de qualité nécessitant peu d’entretien. Elle incarnera en tous points notre vision d’une architecture réussie. Nous ne prétendons pas qu’elle sera la plus belle ni la mieux pensée de toutes, mais elle conviendra parfaitement à la vie de notre famille et à nos besoins actuels et futurs. Nous ne prétendons pas non plus que sa conception réinventera la roue, mais elle nous correspond jusque dans les moindres détails et nous en sommes très fiers! En fin de compte, les innombrables nuits d’insomnie à repasser les mêmes questions en boucle ou à ne pas être en mesure de prendre des décisions auront été bénéfiques: elles nous ont permis de gagner en assurance quant à nos choix et ont raffermi notre confiance en notre design.
Revers
L’air de rien, nous n’en étions qu’au début de notre aventure… Nous connaissions très peu de gens qui s’étaient lancés avant nous dans un projet d’autoconstruction et nous avons vite compris que nous allions devoir gérer les tâches une à la fois, et apprendre sur le tas, en accéléré!
À la même période, nous constations que nous allions subir à notre tour les revers du boom immobilier pandémique. Avions-nous réellement pris la bonne décision? Nous étions bien placés pour le savoir, nous avions les deux pieds dedans; nous aurions dû mieux nous y préparer… et pourtant! Au moment où nous devions passer des commandes essentielles, on nous prévoyait souvent entre six et huit mois d’attente; on exigeait également des dépôts allant de 20% à 50% sur ces mêmes commandes. Malheureusement, les banques ne financent pas les montants avancés pour payer ces acomptes, puisque les déboursés progressifs sont attribués en fonction des tâches réalisées et cochées au sein d’une grille standard. Pendant plusieurs mois, il a donc fallu nous financer nous-mêmes temporairement! Inévitablement, la peur de ne pas avoir les moyens de nos ambitions s’est emparée de nous…
D’ailleurs, il ne faut pas longtemps pour se rendre compte que la fameuse grille standard de financement des banques a été conçue en prévision de la construction d’une maison de banlieue typique ne ressemblant en rien à celle que nous allions nous construire en forêt. Par moment, en la remplissant, nous avions sincèrement l’impression d’essayer d’entrer des carrés dans des ronds… Nous y reviendrons.
Plonger
Je racontais plus haut la chance que nous avons eue de vendre notre ancienne maison à une période particulièrement favorable qui nous a beaucoup facilité la vie en début de parcours, mais je n’ai pas mentionné la peur qui s’est emparée de nous au moment de la signature notariée de la vente. Il s’agit d’un sentiment très humain d’être pris de vertige avant de plonger – on y échappe rarement. Nous avons vécu les jours suivants dans une tourmente d’émotions furieuses: découragement, étourdissement, terreur, tristesse, angoisse, contrariété, doute… Nous venions de faire un pas de plus vers la réalisation de notre rêve, mais nous avions l’impression de nous retrouver au bord d’une falaise, avec le vide devant. Ne restait plus qu’à fermer les yeux et faire confiance.
Après tout, ne dit-on pas que « le vrai courage, c’est de plonger malgré la peur » ?
Maryse
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